Ordonnances présidentielles - La Haute Cour Constitutionnelle coupe la poire en deux
Le verdict de la HCC sur la requête formulée par le président du Sénat contre les ordonnances prises par le chef de l’État, a été rendu, hier. La décision sonne comme un arbitrage pour éviter un bras de fer institutionnel.
Une conciliation. En substance, telle est la portée de la décision de la Haute cour constitutionnelle (HCC), publiée, hier. En réponse à la requête formulée par Rivo Rakotovao, président du Sénat, la Cour d’Ambohidahy confirme le principe qu’elle a édicté au sujet des ordonnances pris par le chef de l’État, tout en évitant une éventuelle guerre ouverte entre l’Exécutif et la Chambre haute.
« (…) l’obligation de rendre compte de ce que l’on fait ou de ce que l’on ne fait pas dans le cadre de la délégation constitue un des critères de délégation de pouvoirs. Qu’en ce qui concerne la délégation de pouvoirs dans l’esprit de l’article 104 de la Constitution, l’obligation de rendre compte se traduit par l’obligation de dépôt de projet de loi de ratification pour que l’autorité délégataire (…) pour validation les différentes ordonnances qui ont été prises », explique la HCC dans le XIe considérant de sa décision.
Toujours dans ce considérant 11, la Cour d’Ambohidahy ajoute que « l’objet essentiel du projet de loi de ratification est donc bien de maintenir en vigueur les ordonnances édictées ». Dans une requête en date du 14 janvier, le numéro un du Sénat a demandé à la HCC qu’elle déclare caduques les ordonnances prises en conseil des ministres par Andry Rajoelina, président de la République, pendant que le pouvoir de légiférer lui a est déléguée par le Parlement.
Le principal argument soulevé dans la requête du président de la Chambre haute est le point 3 de la décision de la HCC sur le contrôle de constitutionnalité de la loi déléguant le pouvoir de légiférer au Président de la République. La Cour y a souligné l’obligation pour l’Exécutif de déposer des projets de loi de ratification des ordonnances présidentielles, devant le Parlement « au cours de la sa seconde session ordinaire de l’année 2019 ».
Répliquant à la démarche de Rivo Rakotovao, les défenseurs des actes de l’Exécutif ont martelé que la Loi fondamentale ne prévoyait aucune procédure de ratification des textes édictés dans le cadre de la délégation de pouvoirs, prévu à son article 104. La HCC précise, cependant, que « le principe de la ratification des ordonnances a notamment, été posé par la Cour de céans dans son avis du 10 mai 2012 ». Il s’agit d’un avis sur la compétence du président de la Transition, à l’époque, à légiférer par voie d’ordonnance.
Sur la demande du président du Sénat que les ordonnances prises par le chef de l’État soient déclarées caduques, la HCC répond que la déclaration de caducité obéit à des conditions préalables. Elle avance, notamment, qu’en sus du délai indiqué pour le dépôt d’un projet de loi de ratification, il aurait fallu que l’’Exécutif manifeste une résistance expresse ou un désintérêt explicite pour l’adoption du projet de ratification. Ce qui n’est pas démontré affirme la Cour.
« Qu’en l’absence des actes justifiant cette opposition, la Cour de céans, (…) enjoint le gouvernement à régulariser le dépôt du projet de loi de ratification sous peine de caducité des ordonnances prises par le Président de la République en 2019. Que la ratification de l’ordonnance ne peut être qu’expresse, c’est-à-dire résultant du vote d’un projet de loi déposé à cet effet », édicte alors l’institution d’Ambohidahy.
Au motif du principe de la continuité de l’État et de la sécurité juridique, la HCC ajoute que la date de ratification n’est pas substantielle, mais recommande néanmoins, qu’elle soit faite dans les meilleurs délais. Elle fixe alors, la prochaine session ordinaire du Parlement comme nouvelle échéance. Pour faciliter la tâche de l’Exécutif, elle indique même que la pratique de ratification groupée est possible et fréquente.
La Cour exempte de ratification l’ordonnance portant loi de finances rectificatives 2019, déjà entièrement exécutée et celles concernant des accords de prêt déjà en cours d’engagement. La HCC ne dit, cependant, pas ce qu’il en sera dans l’éventualité où le projet de loi de ratification n’obtient l’onction parlementaire comme ça a été le cas pour le projet de loi de finances 2020, dernièrement.