Handicap et sexualité : un tabou que le projet M’iray veut continuer de briser
La deuxième phase du projet M’iray ambitionne de briser les tabous, d’améliorer l’accès à l’information et de renforcer le plaidoyer en faveur des droits sexuels et reproductifs des personnes en situation de handicap, dans un contexte social malgache marqué par de profondes tensions.
Sexualité, un sujet largement tabou à Madagascar
À Madagascar, la sexualité demeure un sujet sensible, rarement abordé dans l’espace public. Cette réserve est encore plus marquée lorsqu’il s’agit des personnes en situation de handicap, dont les besoins en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs restent souvent ignorés. Dans un pays jeune, où l’âge médian est de 21 ans, les défis liés aux droits sexuels et reproductifs demeurent importants, notamment les grossesses précoces, les avortements non sécurisés, la faible utilisation de contraceptifs et les taux élevés d’IST et de VIH.
Pour les 15 % de la population estimés vivre avec un handicap, ces difficultés sont accentuées par un manque d’accès à l’information et aux services adaptés. Les jeunes filles et femmes en situation de handicap sont particulièrement exposées aux violences sexuelles, tandis que l’absence d’éducation sexuelle complète limite la prévention et la prise en charge des risques. Selon une étude du mouvement Nifin’Akanga publiée en 2021, le manque de dialogue au sein des familles incite les enfants victimes d’agression à ne pas se confier.
Projet M’iray, pour faire entendre les personnes handicapées
Face à ces enjeux, l’organisation Autisme Madagascar a mis en œuvre le projet M’iray, avec le soutien d’AmplifyChange. La première phase du projet a permis de libérer la parole de nombreuses personnes en situation de handicap, souvent pour la première fois reconnues comme des individus disposant de droits, de choix et d’émotions. Les activités ont débuté par des ateliers de consultation réunissant 77 personnes en situation de handicap et 75 aidants. Ces rencontres ont permis de recueillir des témoignages sur la sexualité et la santé reproductive, en mettant l’accent sur les personnes vivant avec des handicaps intellectuels ou invisibles. Les données collectées ont servi de base à des sessions de formation destinées aux participants et à leurs aidants. Ces formations ont abouti à la création d’un réseau de pairs éducateurs et au développement d’un outil pédagogique visant à rendre les informations sur la sexualité plus accessibles et adaptées.
Les résultats des ateliers ont ensuite été présentés aux pouvoirs publics et aux organisations de la société civile afin d’encourager une meilleure prise en compte des personnes en situation de handicap dans les politiques nationales relatives à la santé sexuelle et reproductive.
Plus de liberté et d’égalité
La deuxième phase du projet M’iray est lancée dans un contexte national marqué par les mobilisations citoyennes, lancées au mois de septembre 2025, et qui a conduit à la mise en place d’un régime de transition dirigé par l’armée. Dans ce contexte tendu, Autisme Madagascar souhaite poursuivre son action en faveur d’une société plus inclusive, où les droits individuels et l’autonomie sont respectés. Les aspirations des jeunes mobilisés pour davantage de liberté et d’égalité résonnent avec les principes défendus par le projet.
La nouvelle phase du projet M’iray vise à renforcer les actions de plaidoyer auprès des autorités et des acteurs de la société civile afin d’améliorer l’accès aux services et à l’information sur la santé sexuelle et reproductive pour les personnes en situation de handicap. Elle met également l’accent sur des formations innovantes axées sur la sexualité, le bien-être et l’autonomie corporelle, dans une démarche d’ouverture et de respect. Autisme Madagascar ambitionne également de consolider le « Mouvement pour la différence », une coalition destinée à fédérer les organisations engagées dans la défense des droits des personnes en situation de handicap et à mener des actions de plaidoyer à long terme.



