Vaccination en péril sans soutien durable : Madagascar cherche des alternatives
Le forum international sur le financement durable des vaccins s’est tenu à Istanbul, en Turquie, du 15 au 16 avril 2025. La délégation malgache, composée de parlementaires et d’un représentant de la société civile, y a réaffirmé l’importance d’un engagement plus important de l’État, dans le financement de la vaccination, dans un contexte de dépendance persistante vis-à-vis des bailleurs internationaux.
Création d’un réseau interparlementaire
La capitale turque a accueilli des délégations issues de 9 pays d’Afrique et d’Asie, dont celle de Madagascar, pour débattre des enjeux liés au financement durable des vaccins. Parmi les participants malgaches figuraient Lova Herizo Rajaobelina, député de Moramanga et président de la Commission de la santé publique et du planning familial à l'Assemblée nationale ; Johnny Rakotoarisoa, député d’Ambohidratrimo, ainsi que Willy Jean Beninandiana, secrétaire exécutif de la plateforme de la société civile pour la nutrition HINA.
Les échanges ont porté sur les bonnes pratiques, les expériences nationales en matière d’acquisition de vaccins, ainsi que sur les pistes pour améliorer la mobilisation des ressources internes. Une attention particulière a été portée à la création d’un réseau interparlementaire Afrique-Asie pour renforcer le plaidoyer en faveur de la vaccination.
Dépendance aux financements extérieurs
À Madagascar, environ 80 % des vaccins sont actuellement financés par des partenaires internationaux, notamment l’alliance Gavi. Cette situation soulève des inquiétudes en cas de retrait ou de réduction de ces soutiens. Les parlementaires malgaches présents au forum ont souligné la nécessité de renforcer les ressources publiques allouées à l’achat de vaccins, pour éviter une interruption des campagnes de vaccination. Lova Herizo Rajaobelina a insisté sur l’importance de convaincre les pouvoirs exécutifs d’augmenter cette part nationale. De son côté, Johnny Rakotoarisoa a rappelé que si d’autres bailleurs suivaient la décision des États-Unis de réduire leur financement, le pays pourrait se retrouver dans une situation critique.
Pour progresser vers l’autonomie vaccinale, les parlementaires malgaches rappellent l’existence de la loi n° 2016-058, adoptée en 2016, qui prévoit la création d’un Fonds national pour la vaccination. Cette loi n’a toutefois jamais été mise en œuvre. Sa mise en application permettrait de sécuriser des ressources nationales dédiées à la vaccination et d’amorcer une transition vers un financement durable. La délégation malgache a réitéré son engagement à collaborer avec les autorités sanitaires et les organisations de la société civile afin de renforcer l’action parlementaire en faveur de la santé publique.
Étude sur l’espace fiscal
La société civile, à travers le consortium formé par HINA, le CCOC et NOSYW, joue également un rôle actif dans ce plaidoyer. Ce consortium met en œuvre à Madagascar le projet « Plaidoyer pour la vaccination et le financement des soins de santé primaires », avec le soutien du GHAI. Dans ce cadre, une étude sur l’espace fiscal du pays est en cours de préparation, afin d’explorer de nouvelles sources de financement autres que l’impôt, a expliqué Willy Beninandiana. Les résultats seront présentés lors d’un atelier réunissant décideurs et représentants de la société civile, en vue d’évaluer leur pertinence et leur faisabilité.
La participation de Madagascar au forum d’Istanbul s’inscrit dans son engagement à atteindre les Objectifs de développement durable (ODD), en particulier l’ODD 3 relatif à la santé et au bien-être. Le pays fait encore face à d’importants défis, notamment la couverture vaccinale incomplète : près de 1,2 million d’enfants n’ont reçu aucune dose de vaccin. Par ailleurs, l’« Appel d’Istanbul à l’action » adopté à l’issue du forum engage les parlementaires à renforcer leur rôle dans la priorisation de la vaccination dans les budgets nationaux, à encourager la mise en place de mécanismes de financement responsables, et à collaborer étroitement avec les organisations de la société civile.