VIH et drogues - L’Océan Indien en alerte face à une crise croissante
Alors que les progrès contre le VIH étaient prometteurs ces dernières années, la situation sanitaire dans certains pays de l’Océan Indien connaît une dégradation inquiétante.
À Madagascar, les nouvelles infections au VIH sont en forte hausse, exacerbées par l’augmentation de la consommation de drogues, notamment l’héroïne, un phénomène commun à plusieurs îles de la région.
Colloque
En octobre dernier, un colloque international s’est tenu à Antananarivo, regroupant des experts des Comores, de Madagascar, de La Réunion, de Rodrigues et des Seychelles. Ce rendez-vous visait à dresser un état des lieux des infections sexuellement transmissibles (IST), du VIH, des hépatites et des addictions dans la région, ainsi qu’à envisager une coopération régionale pour endiguer ces fléaux. Le constat a été alarmant. Entre 2006 et 2022, les infections au VIH ont bondi de 151% à Madagascar, selon le docteur Catherine Gaud, présidente de l’association Rive. Seuls 22% des personnes contaminées auraient été diagnostiquées, et la situation pourrait être encore plus préoccupante : "Nous estimons que 5% de la population malgache est infectée, soit environ 1,5 million de personnes", précise-t-elle. Dans le nord du pays, à Diego Suarez, environ 10% de la population serait touchée par le VIH. Cependant, si 99% des personnes diagnostiquées ont accès à un traitement, seulement 57% d’entre elles présentent une charge virale indétectable, posant ainsi la question de la qualité des soins.
Crise sanitaire
L’augmentation de la consommation de drogues, notamment l’héroïne, contribue à aggraver la crise sanitaire. Madagascar, devenue une plaque tournante de la drogue, voit une progression de l’usage de l’héroïne, augmentant les risques d’infection au VIH et à l’hépatite C, principalement par le partage de seringues. Les autres îles de la région sont également concernées. Aux Seychelles, 10% de la population consomme de l’héroïne, tandis que les Comores font face à une stigmatisation qui rend difficile l’accès aux soins pour les personnes vivant avec le VIH. À Maurice, malgré une réforme de la loi sur la criminalisation des consommateurs de drogues, l’épidémie du VIH continue de progresser, touchant principalement les usagers de drogues et les travailleurs du sexe. Face à cette situation, les experts de la santé réclament une réponse coordonnée à l’échelle régionale. Le docteur Gaud appelle à déstigmatiser les patients et à renforcer les capacités locales en matière de dépistage et de prévention. "L’accès aux soins et à la prévention doit être une priorité pour toute la région", conclut-elle.