Suspension des contrôles routiers - La police trame une riposte
Les syndicats au sein de la police nationale s’érigent contre la décision de suspension de la mission de police de la route. Une mesure provisoire pour endiguer la corruption.
De la résistance. La grogne couvait depuis quelques jours. Les langues se sont ainsi, déliées, hier. C’est de la bouche de Lescoeurs Louis Rakotoarisoa, président national du corps des inspecteurs de police que la revendication a été affirmée ouvertement, hier.
Devant la presse, à l’issue d’une réunion au Kianjan’ny Kanto, à Mahamasina, les syndicats, au sein de la police nationale ont fait part de leur opposition à la décision du gouvernement de suspendre la mission de la route. « Il s’agit d’une mission quotidienne de la police. (…) D’une manière solidaire, les syndicats demandent à l’État de ne pas retirer à la police cette mission quotidienne », déclare Lescoeurs Louis Rakotoarisoa.
Les syndicats requièrent, donc, une rencontre avec le ministre de la Sécurité publique pour lui faire part de leurs revendications. Sans quoi, « nous prendrons des mesures syndicales », menace Hery Randrianarison, l’un des syndicalistes qui ont pris la parole, hier. La décision de suspendre la mission de police de la route pour la police nationale, mais également, la gendarmerie nationale a été effective depuis un peu plus d’une semaine.
Dans le rapport du conseil du gouvernement du 22 février, il est expliqué que « la principale raison de la décision a trait à la multitude de remarques défavorables des usagers de la route pour tracasseries inutiles et actes de corruption lors des services de police de la route ». Les agissements des agents qui en mission de police de la route font partie des raisons qui font que la police nationale et la gendarmerie nationale occupent le haut du classement des entités jugées par les citoyens comme les plus corrompus.
Une catégorie des usagers de la route, notamment, les étrangers et les transporteurs considèrent comme des harcèlements, et des raquettes, les actes de certains agents. « La suspension est justifiée par le souci de ne pas donner davantage d’opportunités à la corruption. Un plan de réforme est ainsi, à mettre en œuvre dans les meilleurs délais possibles », ajoute le rapport du conseil du gouvernement.
« Nous acquiesçons qu’il s’agit de l’application de la politique de lutte contre la corruption, mais je tiens à rappeler que la police a créé un service de lutte contre la corruption bien avant la création du BIANCO [Bureau indépendant anti-corruption] », argue Lescoeurs Louis Rakotoarisoa. Au regard de la persistance de la perception négative des citoyens sur le niveau de corruption au sein de la police nationale, ce service semble avoir failli à sa mission.
La police nationale, par ailleurs, a la malheureuse réputation comme étant l’une des entités les plus corporatistes. La gestion par ses hauts responsables du dossier Antsakabary est un des regrettables exemples. Le président du corps des inspecteurs de police a ajouté, hier, « la suspension fait débat. Le gouvernement ne devrait pas parler de suspension de mission, mais de suspension de la corruption ».
S’agissant de la corruption, il serait préférable de parler d’annihilation plutôt que de suspension. Mettre fin à la corruption, par ailleurs, ne se décrète pas et nécessite une prise de conscience, la volonté et l’action de chaque acteur. Les syndicalistes, par ailleurs, ne semblent pas avoir compris les objectifs et la portée de la décision gouvernementale.
« Le gouvernement tient à préciser qu’il s’agit d’une suspension donc, provisoire, et nullement d’une annulation définitive des missions de police de la route (…) Par ailleurs, il n’a jamais été question de remettre en cause le pouvoir de verbalisation reconnu aux missions de police de la route », souligne le communiqué du conseil du gouvernement.
Le risque d’un bras de fer entre les syndicats et le gouvernement n’est pas à écarter. Le fait que Christian Ntsay, Premier ministre, himself, ait pris en flagrant délit deux agents de police et deux gendarmes en plein acte de corruption sur les routes d’Antsiranana, ne plaide, toutefois, pas en faveur des syndiqués. Les quatre hommes ont, par ailleurs, transgressé la décision de la mission de la police de la route qui a déjà été effective au moment des faits.