Attaque au véhicule-bélier à Toronto: le tueur misogyne devant la justice
Attaque au véhicule-bélier à Toronto: le tueur misogyne devant la justice
Plus de deux ans après la tuerie qui avait choqué le monde entier, le procès d'Alek Minassian, accusé d'avoir renversé et tué dix personnes au volant d'une fourgonnette à Toronto en avril 2018 au nom de la mouvance misogyne des "Incels", s'ouvre mardi.
Le jeune homme de 28 ans a reconnu avoir loué une camionnette le 23 avril 2018 et avoir tué huit femmes et deux hommes, âgés de 22 à 94 ans, dans sa course meurtrière sur les trottoirs du nord de la métropole canadienne. Seize personnes ont aussi été blessées dans l'attaque.
"Je pense avoir accompli ma mission", avait-il affirmé à la police, lors de son interrogatoire quelques heures après le drame et son interpellation rapide.
Le procès, qui se tient devant la Cour supérieure de l'Ontario, devait avoir lieu au printemps, mais il a été repoussé à cause de la pandémie de Covid-19.
En raison des restrictions de rassemblement, il se déroulera virtuellement via l'application Zoom, devant un juge unique et sans jury. Il devrait durer environ quatre semaines.
Alek Minassian comparaîtra depuis sa prison. La juge, le procureur, la défense et les témoins se connecteront de différents lieux. Le palais des congrès de Toronto retransmettra les audiences sur écrans pour le grand public.
M. Minassian devra répondre de 10 chefs d'accusation de meurtre avec préméditation et 16 tentatives de meurtre.
Puisqu'il a déjà admis avoir planifié et perpétré le carnage, le procès portera sur son état d'esprit et sa responsabilité pénale au moment de l'attaque.
Selon le quotidien Toronto Star, la défense devrait plaider qu'il n'est pas pénalement responsable.
Selon les médias canadiens, il souffre du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme comprenant des troubles des interactions sociales ou de la communication.
L'attaque avait eu lieu un lundi ensoleillé de printemps, en début d'après-midi, dans le quartier de North York, au nord de la rue Yonge, une des artères les plus fréquentées de la plus grande métropole canadienne.
Au volant d'une camionnette blanche de location, l'accusé, qui résidait dans la banlieue nord de la ville, avait roulé à vive allure entre les voies de circulation et les trottoirs, visant les passants sur environ deux kilomètres.
# Un "produit d'internet"
Avant de passer à l'acte, l'accusé avait publié sur Facebook un message à caractère misogyne dans lequel il assurait: "la rébellion +Incel+ a déjà commencé!".
Abréviation anglophone pour "involontairement célibataire," la mouvance "Incel" regroupe des hommes exprimant, notamment sur des forums en ligne, leur mépris des femmes, responsables selon eux de leur insatisfaction sexuelle.
Dans sa publication sur Facebook, l'accusé avait fait référence à Elliot Rodger, auteur d'une tuerie sur un campus californien en 2014, un crime qu'il avait décrit comme un "châtiment" pour les femmes l'ayant rejeté.
Si c'est une "mouvance transnationale", les Incels sont principalement basés en Amérique du Nord, explique une analyste de Moonshot, une organisation britannique qui oeuvre à combattre l'extrémisme violent en ligne.
La plupart sont des adolescents ou sont dans leur vingtaine, dit-elle. Beaucoup disent souffrir de troubles de la santé mentale ou d'autisme.
"Plus que n'importe quel autre groupe extrémiste, ils sont un produit d'internet. Ils sont nés sur Internet," explique à l'AFP la chercheuse qui a souhaité rester anonyme.
Forum actuellement le plus actif, le site incels.co rassemble quelque 11.500 membres qui discutent, entre autres, de "violence contre les femmes" et analysent les attaques perpétrées par des Incels comme Alek Minassian et Elliot Rodger, dit-elle.
Tous deux sont vus comme des "héros" par une partie de la communauté qui devrait "regarder de près" le procès, ajoute-t-elle.
En mai, un adolescent de 17 ans soupçonné d'avoir tué une femme à coups de machette dans un salon de massage de Toronto, a été inculpé de terrorisme en raison de ses liens avec la mouvance Incel, une première au Canada.
Alek Minassian, en revanche, n'a pas été inculpé de terrorisme.