Lutte contre la culture du viol et de l'inceste à Madagascar : Des perspectives offertes par les recherches

Des questions restées dans l'ombre

Cette initiative, lancée par le mouvement féministe malgache Nifin’Akanga, a permis à six lauréats de présenter les résultats de leurs recherches, jetant ainsi une lumière vive sur des questions souvent restées dans l'ombre. Parmi les chercheurs récompensés, Herilaza Hugues Randrianjohany a examiné l'impact des pratiques culturelles et sociales sur la persistance des cas de viol au sein de la communauté Sakalava de Boeny. Cedric Ranjalahy s'est penché sur l'exploration de la culture du viol lors des séances de bizutages dans les instituts supérieurs malgaches. Riana Raymonde Randrianarisoa a mis en lumière les liens entre pauvreté, pratiques occultes et inceste, notamment dans son étude intitulée "Des filles innocentes sur le plateau du diable". Hasina Raveloson a étudié les brutalités envers les femmes et les pratiques de l'inceste chez Radama, tandis que Dina Nomena Andriarimanjaka a analysé la culture du viol à travers le prisme des médias et du langage. Enfin, Maharisoa Ralambosoa s'est intéressé à la culture du viol en ligne à Madagascar, examinant ses mécanismes et sa rhétorique.

Manque de données

Les statistiques alarmantes issues d'une étude nationale menée par le Mouvement Nifin'akanga en 2022 révèlent l'ampleur du problème : sur un échantillon de 460 femmes, 68% ont été victimes de violence sexuelle, dont 25% par leur partenaire. De plus, 17,5% ont été victimes d'attouchements qui ont abouti à des actes de viol ou d'agression, et 14% ont été victimes d'inceste. Mbolatiana Raveloarimisa, fondatrice du mouvement Nifin’Akanga, souligne l'importance cruciale de cette recherche. Elle explique que le manque de données et de documentation scientifique sur la culture du viol et de l'inceste à Madagascar a motivé l'octroi de ces bourses. L'objectif est d'apporter une perspective scientifique à cette réalité souvent méconnue. Outre la présentation des résultats de recherche, cet atelier visait à susciter une discussion constructive sur l'importance de cette thématique dans la société malagasy. Il a également permis d'identifier des pistes d'action concrètes pour lutter contre ces pratiques insidieuses.

Contre toutes formes de violence

Nifin’Akanga, en tant que mouvement féministe pro-choix, s'engage à combattre toutes les formes de violence faites aux femmes à Madagascar. Cela implique un changement profond au niveau de l'éducation, des attitudes sociales, des politiques gouvernementales et des systèmes juridiques. Le mouvement plaide notamment pour l'autorisation de l'interruption de grossesse en cas d'inceste, de viol ou de risque médical, tout en menant des campagnes de sensibilisation à tous les niveaux de la société. Le processus de sélection des lauréats a été rigoureux, avec une centaine de candidats luttant pour obtenir une des cinq bourses disponibles. Nifin’Akanga envisage cependant de poursuivre cette action de recherche en octroyant d'autres bourses, consciente du besoin de soutenir davantage de chercheurs engagés dans cette cause vitale.